Quand les paroles innocentes d’une enfant dévoilent un secret familial enfoui

Publié le 12 novembre 2025

Lina, avec une infinie douceur, berçait sa petite sœur née récemment. Depuis mon lit de maternité, je l'observais, encore émue par la scène, ressentant la joie communicative de Lina. Puis, elle murmura quelque chose d'inattendu : « Maintenant, j'ai quelqu'un à qui je peux dire mes secrets, ceux que je ne partage pas avec papa. »

Je crus d’abord que c’était simplement l’imagination débordante d’un enfant. Cependant, cette phrase continua de résonner en moi, comme un écho persistant.

Des mots qui provoquent un trouble

Le temps passa. Lina, comme beaucoup d’enfants de son âge, avait une imagination fertile, inventant mille histoires. Un jour, je surpris un murmure à ses poupées : « On ne le dit pas à papa. C’est notre secret. »
Curieuse, je lui demandai de quoi il s’agissait, mais elle évita mon regard, visiblement nerveuse, avant de s’éclipser dans sa chambre.

Cela semblait peut-être anodin… mais une mère sait quand quelque chose ne va pas.

“Le monstre ne vient que quand papa n’est pas là”

Un soir, alors que le crépuscule tombait, je l’entendis chuchoter à sa petite sœur : « Si papa demande, dis-lui que le monstre n’apparaît que quand il n’est pas là. »

Ces mots me glacèrent. En l’interrogeant sur l’identité de ce “monstre”, elle décrivit une silhouette grande et sombre, parfois visible à travers les fenêtres ou cachée dans la cuisine. Selon elle, ce monstre avait une voix que Lila, le bébé, aurait pu “reconnaître”.

Je tentai de la rassurer, pensant à un mauvais rêve. Pourtant, une inquiétude profonde s’installa.

Un dessin révélateur

Une nuit, je découvris dans sa chambre un dessin troublant : une silhouette noire dominant deux petites formes, avec cette phrase enfantine tracée au crayon : “Ne le laissez pas l’emmener.”

Je discutai de cela avec mon mari, Julien. Il fut secoué, mais aussi mal à l’aise. Nous décidâmes de consulter une psychologue pour enfants pour comprendre l’origine de cette peur.

Quelques jours plus tard, Lina disparut un court instant. Nous la retrouvâmes recroquevillée dans le débarras, serrant Lila contre elle.
« Le monstre a dit qu’il venait. Il m’a dit que je pouvais lui donner Lila », murmura-t-elle, tremblante.

Personne n’était entré dans la maison.

Quand la vérité émerge

Avec l’aide de la psychologue, Lina finit par s’ouvrir. Ce “monstre” n’était pas une invention de son esprit : il symbolisait son ressenti lorsque son père, sous le coup du stress et de l’épuisement, laissait parfois éclater sa colère durant ma grossesse.
Elle évoquait “le bruit des portes qui claquent” et “l’odeur de la bière” — des détails précis qui traduisaient une peur bien réelle.

Julien écouta, profondément touché. Il n’avait jamais eu l’intention d’effrayer sa fille, mais il comprit combien son comportement l’avait marquée. Il décida alors d’entamer un processus pour apprendre à gérer son stress et retrouver un équilibre.

La guérison, progressivement

Petit à petit, l’atmosphère changea. Julien s’engagea dans la thérapie familiale, Lina retrouva confiance, et la maison se remplit à nouveau de rires. Les “monstres” disparurent de ses dessins, remplacés par des arcs-en-ciel et des visages souriants.

Un matin, alors que nous préparions le petit déjeuner, Lina annonça simplement :
« Je n’ai plus de secrets à garder. »

Ce fut la plus belle phrase que j’aie entendue.

Ce que j’ai appris

Les enfants ont parfois une manière poétique et détournée d’exprimer leurs peurs. Leurs “monstres” ne sont pas toujours des ombres : ils peuvent naître du bruit, de la tension, des silences.
Mais en écoutant vraiment, on peut transformer la peur en lumière.

Parce qu’au fond, aucun enfant ne devrait jamais apprendre à garder le silence pour se sentir en sécurité.